Samedi 7 septembre. Virée n°8 au Paradise de Saarbrücken.
Les rayons du soleil m'ont, désespérément, réveillé sur les coups de huit heures du matin. La veille, un concert improvisé m'a tenu en haleine jusque tard. Je n'ai pas tellement dormi. Ce matelas est trop dur et j'ai des fourmis dans les cuisses. J'ai réfléchi aux multiples façons d'apprivoiser les plaisirs de la chair avant de quitter la Marne - département économiquement, socialement, culturellement sinistré - sur les coups de onze heures.
L'A4 est une autoroute qui monte, descend, puis remonte encore lorsqu'on arrive en Meuse - département économiquement, socialement, culturellement sinistré. Je me suis arrêté sur une aire d'autoroute après avoir parcouru 70-80 kilomètres. Je me suis dégourdi les jambes et en ai profité pour m'asseoir sur un banc en bois ; un banc visiblement amoché par les affres du temps qui passe. À mes côtés, des sexagénaires allemands s'esclaffent en mangeant un taboulé "Marque repère". Le sexagénaire allemand est un être rustre, vil, puéril lorsqu'il s'attarde sur le décolleté d'une jeune métisse à la poitrine opulente. Ne voulant être un être rustre, vil, puéril ( même si je confesse que je me suis allègrement attardé sur le décolleté de la jeune métisse à la poitrine opulente), je reprends le volant en sirotant quelques gorgées d'une boisson énergétique sans sucre encore fraîche. Je souris et lâche une larme en voyant un panneau indiquant Strasbourg à 187 kilomètres. Pour tout un tas de raisons relevant, presque de l'intime, l'Alsace me manque. Longtemps, j'ai maudit les déracinés, ceux qui pour l'ailleurs était le chez soi. À la faveur d'éléments impromptus, j'ai peur, si peur d'en devenir un.
Passé les questionnements d'ordre existentiels, je contourne Metz par le nord et arrive
en Moselle - département économiquement, socialement, culturellement sinistré - sur les coups de midi trente. Le soleil tape fort et je dois m'arrêter pour pisser. Sur cette aire de repos, pas d'allemands, pas de néerlandais, juste quelques couples qui rentrent des vacances. L'un d'entre eux est composé d'un trentenaire, barbe de trois jours, et d'une fille, plus jeune que lui, robe à fleurs et petites fesses bombées. Ma respiration se fait plus hachée lorsque je passe derrière elle. Elle le sent, elle le comprend. Elle se cambre davantage devant le regard vide de son compagnon. Je ne dis rien, simplement obnubilé par la vue prochaine de roumaines en tenue d'Ève. La route est calme. Il n'y a pas beaucoup de voitures jusqu'aux confins de la frontière allemande et je sors à Freyming-Merlebach afin de retirer. La ville est déserte, seuls deux "cassos" zonent en tirant sur un joint roulé avec soin. Vingt minutes après, Saarbrücken se redécouvre à moi. Je me gare sur le parking de l'étage et en profite pour m'imprégner des lieux. Je sens une odeur de grillade, et surtout, surtout le doux parfum de la luxure. J'échange quelques mots avec l'hôtesse d'accueil, me change et rentre dans la fosse aux lionnes. Il fait chaud, il y a du bruit (Hallucinate", Dua Lipa), deux blondes peroxydées passent à côté de moi en effleurant ma main.
Comme d'habitude, je me rends au restaurant afin de repérer mes proies. Je prends une petite assiette de pâtes et voit un turn-over incessant de demoiselles à la recherche de chambres. Je file à l'extérieur et, dehors, Georgiana - grande et plantureuse blonde que j'ai déjà eu l'occasion de booker à deux reprises - me fait des signes afin que je la rejoigne. Je ne dis rien, essaye de me faire oublier et la voit repartir à la recherche d'un autre homme à vider. Au bout d'une bonne quarantaine de minutes, je me décide à rejoindre le bar. J'échange quelques mots avec ma muse bulgare répandant au doux nom de Sarita et me sers un coca sans sucre. Là, au bar, je cherche à me perdre dans les bras d'Alicia, roumaine de 23-24 ans à la poitrine opulente et aux courbes taillées par Michel-Ange lui-même. Une heure durant (quarante, quarante cinq minutes en réalité), je l'embrasserai, la caresserai, la pénètrerai avec toute la vigueur qu'il convient d'avoir lorsqu'on se trouve en compagnie d'une 9/10. Durant cette intense session, je n'aurai rien voulu d'autre que la finesse de son visage, la longueur de ses jambes, la fermeté de sa poitrine. Je l'embrasse une dernière fois avant de partir et lui prends la main avant de regagner mes compagnons de virée à l'extérieur.
Les rayons du soleil tapent fort et je dois m'asseoir sur une chaise, en face d'un Youppinaute qui m'a reconnu. On échange nos impressions sur le moment, les filles et la baisse relative des FKK depuis le COVID. À force de discuter, j'ai du mal à avoir conscience du temps qui passe. À côté de nous, deux-trois employés du club monte un chapiteau ou quelque chose qui, tout du moins, y ressemble fortement. Une légère brise caresse mes joues. C'est le moment que je choisis pour rentrer et continuer la discussion avec un type qui habite à quelques kilomètres de la frontière. Les filles sont un peu bizarres. Elles ont du mal à faire la part des choses entre ceux qui sont prêts à remonter en chambre et les autres. Moi, je veux juste discuter et, de temps à autre, regarder la fille qui ressemble à Andrada. Je me fais servir plusieurs cocas sans sucre et change de place après qu'une roumaine me fait la gueule car j'ai refusé, à deux-trois reprises, ses avances. Je tourne en rond dans le club à la recherche d'un je ne sais quoi qui me fera vibrer. Devant le cinéma porno, une espagnole bien en chair m'alpague. Nous nous asseyons à l'intérieur du cinéma et l'écoute me chuchoter des phrases que je ne comprends pas en espagnol. Sachant que je vais partir avec elle, et surtout parce que j'ai entendu du bien de ses prestations, je pars en chambre. La session de 30 minutes aura été une agréable session. Elle (j'ai oublié son prénom et ça m'embête. C'est une habituée du club car je l'ai déjà vu plusieurs fois. Espagnole, des kilos en trop, joviale et entraînante) est volontaire, bouge bien et est suffisamment expérimentée pour ne pas me faire durer éternellement. Nous finissons le moment ensemble à discuter de l'Espagne, de Séville et, forcément, de Belmondo qui fait des claquettes.
Un peu terrassé par la fatigue, je reprends quelques forces au restaurant et me met à penser à tout un tas de choses bizarres : la voix aiguë de Michel Polnareff, la vivacité de Jean-Michel Jarre, la fin de l'éclairage public à partir de 23h. Je pars sur les coups de 22h30. Le trajet retour est long, long, long. Il pleut un peu et je m'arrête sur une aire de repos à 45 minutes de route de mon appartement. La radio passe des chanteurs à textes : Renan Luce, Daniel Balavoine, Yann's. Il est presque 1h du matin lorsque je passe la porte de ma demeure. À l'extérieur, les lampadaires sont éteints. Je pense à une roumaine de 24 ans et à la tendresse que j'aurai voulu lui apporter. Je m'endors en essayant de savoir si ma mélancolie lancinante est avant tout liée à l'effondrement des valeurs morales. Une autre fois, peut-être.
PS. Comment refuser, de manière polie, les avances d'une fille avec qui on sait d'avance qu'il ne se passera rien ? Une roumaine m'a rabroué, quasiment insulté parce que je ne suis pas parti avec elle (je n'ai pas son nom. Roumaine, cheveux noirs un peu bouclés, la trentaine).
Salutations à Conseiller54 qui, je le confesse, est un type bien.